Dernière mise à jour le 28 avril 2025

✅ En un clin d’œil : L’essentiel sur le métier de torcedor

  • 🎨 Le torcedor est un artisan maître dans l’art du roulage de cigares, un métier transmis de génération en génération à Cuba.
  • 🛠️ Le processus de fabrication est entièrement manuel : planche en cèdre, chaveta, moule, et colle végétale naturelle.
  • 📜 Ce métier est né en Espagne 🇪🇸 au XVIIIᵉ siècle avant de s’épanouir à Cuba 🇨🇺 après 1817 avec la libéralisation du tabac.
  • 💼 Les torcedores ont aussi joué un rôle clé dans l’économie locale, le syndicalisme et la diffusion culturelle grâce à la tradition du lector 📖.
  • 🏅 Le métier de torcedor est reconnu comme patrimoine culturel national depuis 2012, symbole de l’identité cubaine.

Un cigare est de qualité lorsqu’il est réalisé par un torcedor expérimenté et soigné. Plus qu’un art, la fabrication de cigare est un travail de longue haleine qui consiste à façonner le cigare entièrement à la main. Certes, la qualité des capes, les sous-capes et les différents tabacs n’est pas à négliger, mais, l’esthétisme, l’homogénéité et l’essence même du cigare se jouent grâce à l’expérience sur chaque processus de fabrication et à la délicatesse des mains des torcedores et des torcedoras.

Les « torcedores » et « torcedoras » : qui sont-ils ?

Appelés également « les rouleurs », ce sont des hommes et des femmes qui ont des années d’expérience devant eux et qui connaissent la fabrication de cigare jusqu’au bout des doigts. C’est à Cuba, le berceau du cigare, qu’est née la méthode de fabrication de cigare. Une tradition transmise de génération en génération, de père en fils et de mère en fille. La particularité de ces torcedores est qu’ils n’utilisent aucune machine, tout est fait à la main de la récolte à l’assemblage en passant par l’écolage jusqu’au roulage.

La naissance d’un cigare : les coulisses de sa fabrication

Ici, on parle uniquement du secret de fabrication de cigare faite entièrement à la main par les torcedores. Leurs outils de travail sont simples, car ils utilisent uniquement des planches de bois de cèdre, une guillotine, la chaveta (lame en forme de demi-cercle ressemblant à un couteau sans manche), de la colle végétale incolore et inodore ainsi qu’un cepo (moule à calibrer pour mesurer les dimensions). La fabrication de cigare se fait en 7 étapes :

  • Après la récolte, le séchage et la fermentation des feuilles de tabac, les femmes torcedoras se mettent d’abord à l’écotage qui consiste à enlever délicatement la nervure centrale de la feuille.
  • L’étape suivante consiste au roulage, une étape cruciale qui nécessite au moins cinq années de pratiques pour bien maitriser le roulage de vitole. D’ailleurs, seuls les doyens des torcedores ont le mérite de rouler les habanos les plus prestigieux et les plus complexes. Un bon torcedor doit être en mesure de connaitre et d’assembler les feuilles de tabacs c’est-à-dire le ligero (puissant), le seco (aromatique) et le volado (combustion) selon l’essence et les arômes qu’ils souhaitent obtenir pour former la tripe. Le roulage et l’assemblage de la tripe sont très délicats, car les feuilles ne doivent être ni trop serrées ni trop lâches.
  • Une fois la poupée (la tripe et le sous-cape) obtenue, il place cette poupée dans un moule en bois, il suffit de couper les feuilles qui dépassent avant de presser la moule pendant une demi-heure au moins pour obtenir la forme finale.
  • L’étape suivante consiste à poser la cape. Cette pose de la cape nécessite une grande précaution, elle est étirée et ensuite elle sera enroulée autour de la poupée, la partie lisse visible à l’extérieur.
  • Le torcedor avec ses outils s’occupe désormais de la tête, il coupe une partie de la cape et avec un emporte pièce et il coiffe la tête du cigare avec de la colle végétale. L’autre extrémité du cigare sera coupée selon la longueur désirée à l’aide la guillotine.
  • La dernière phase consiste à la vérification de la qualité du cigare notamment les dimensions, la structure ou encore la forme.
  • À la fin, on trie les cigares par couleur de cape pour y mettre les bagues manuellement. Les cigares dans une même boite doivent avoir les mêmes teintes, uniformes et bien alignés.
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Un torcedor peut rouler en moyenne une centaine soit 90 à 120 de cigares par jour, il est strictement surveillé et il n’a qu’une très faible marge d’erreur, pas plus de 4% sinon on le déduira de son salaire.

Les origines et l’histoire du métier de torcedor

Le métier de torcedor, ou rouleur de cigares, est intimement lié à l’histoire du tabac et à son expansion depuis le Nouveau Monde vers l’Europe. Son évolution reflète les transformations économiques et culturelles qui ont façonné l’industrie du cigare, notamment en Espagne et à Cuba.

Les prémices en Espagne au XVIIIᵉ siècle

Au XVIIIᵉ siècle, la fabrication de cigares devient une activité significative en Espagne. En 1731, la Fabrique royale de tabac de Séville est établie, centralisant la production de cigares destinés à la consommation européenne. Cette manufacture emploie des artisans spécialisés dans le roulage des feuilles de tabac, posant ainsi les bases du métier de torcedor en Europe. Ces premiers rouleurs espagnols développent des techniques artisanales qui seront ultérieurement exportées vers les colonies, notamment Cuba.

Le développement à Cuba après 1817

Cuba, avec son climat et son sol propices à la culture du tabac, émerge rapidement comme un centre majeur de production de cigares. Jusqu’au début du XIXᵉ siècle, la Couronne espagnole maintient un monopole strict sur la production et la vente du tabac cubain. Cependant, le 23 juin 1817, le roi Ferdinand VII d’Espagne abolit ce monopole, ouvrant la voie à la libre culture, fabrication et vente du tabac à Cuba.

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Cette libéralisation stimule la création de nombreuses manufactures de cigares à La Havane et dans d’autres régions cubaines. Les artisans cubains, s’inspirant des techniques espagnoles tout en les adaptant aux spécificités locales, perfectionnent l’art du roulage. Le métier de torcedor devient alors central dans l’économie cubaine, contribuant à la renommée mondiale des cigares cubains.

L’essor et la reconnaissance internationale

Au fil du XIXᵉ siècle, la demande internationale pour les cigares cubains croît de manière exponentielle. Les torcedores cubains acquièrent une réputation d’excellence, maîtrisant l’art complexe de sélectionner, assembler et rouler les feuilles de tabac pour créer des cigares de qualité supérieure. Cette expertise artisanale positionne Cuba comme le berceau incontesté du cigare de luxe, et le métier de torcedor devient emblématique de l’identité culturelle et économique de l’île.

En résumé, le métier de torcedor trouve ses origines dans les manufactures espagnoles du XVIIIᵉ siècle, mais c’est à Cuba, après l’abolition du monopole royal en 1817, qu’il connaît un développement fulgurant. Les artisans cubains, en perfectionnant les techniques de roulage et en adaptant leur savoir-faire aux richesses du terroir local, ont élevé le torcedor au rang de maître incontesté dans l’art de la fabrication de cigares.

L’influence des torcedores sur la société cubaine

Les torcedores, artisans spécialisés dans le roulage des cigares, occupent une place prépondérante dans la société cubaine. Leur rôle dépasse la simple production de cigares de qualité ; ils ont également contribué de manière significative au développement social, politique, économique et culturel de leurs communautés.

Contribution au développement économique

L’industrie du tabac est l’un des piliers de l’économie cubaine, et les torcedores en sont les acteurs clés. Leur savoir-faire artisanal assure la production de cigares de renommée mondiale, tels que les Habanos, qui représentent une part substantielle des exportations du pays. En maintenant des standards de qualité élevés, les torcedores participent activement à la réputation internationale des cigares cubains, soutenant ainsi l’économie nationale et favorisant la création d’emplois locaux.

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Impact social et syndical

À la fin du XIXᵉ siècle, les torcedores ont joué un rôle déterminant dans l’émergence du mouvement syndical cubain. En s’unissant autour de revendications communes, ils ont été à l’origine des premières grèves du pays, luttant pour de meilleures conditions de travail, des salaires équitables et l’accès à l’éducation. Ce militantisme a contribué à éveiller la conscience ouvrière à Cuba, forgeant une identité collective basée sur la solidarité et la défense des droits des travailleurs.

Influence culturelle

Les torcedores ont également laissé une empreinte indélébile sur la culture cubaine. La tradition du lector, où un lecteur est engagé pour lire des journaux et des œuvres littéraires aux ouvriers pendant qu’ils roulent les cigares, illustre l’importance accordée à l’éducation et à la culture au sein des fabriques de tabac. Cette pratique a favorisé la diffusion des idées et a contribué à l’enrichissement intellectuel des travailleurs.

Reconnaissance patrimoniale

En reconnaissance de leur contribution exceptionnelle à la société cubaine, le métier de torcedor a été inscrit au patrimoine culturel national en 2012. Cette distinction souligne l’importance de préserver et de valoriser cet artisanat traditionnel, véritable symbole de l’identité culturelle de Cuba.

En somme, les torcedores ne sont pas seulement des artisans du tabac ; ils sont des acteurs essentiels du tissu social, économique et culturel cubain, ayant marqué l’histoire du pays par leur engagement et leur savoir-faire.